ASSOCIATION des DIRECTEURS RETRAITES des LABORATOIRES VETERINAIRES DEPARTEMENTAUX

L’AIN DES PLAISIRS A VIVRE Du 28 mai au 1er juin 2019

Jeudi 30 mai - Sylans-Oyonnax -
Texte rédigé par Yves Portejoie.
Photos fournies par l’auteur
Programme
Bresse et Dombes
Monastère de Brou
Sylans, Oyonnax
Bourg en Bresse
VétoVermeil
Photo

Vendredi 31 mai 2019, 3ème jour des rencontres annuelles à Bourg en Bresse.  

Il m'échoit d'en faire le compte-rendu pour, si besoin, rafraîchir la mémoire des participants, informer ceux qui n'ont pu venir et attiser les regrets de ceux qui n'ont pas encore osé nous rejoindre.  

De bon matin nous nous levâmes, il faisait clair et beau soleil, nous entendions le rossignol qui chantait dans la ramure...,  

Après un solide petit déjeuner accompagné en fond sonore des bonnes blagues de Lucien, nous gagnons notre bus dans lequel nous montons à 8h54 précisément, le départ étant prévu à 9h destination le Bugey. Ce qui fut dit fut fait.  

Après un trajet de 55 minutes au cours duquel nous passons près d'Hauteville, station dont la pierre est célèbre et est même retrouvée dans l'Empire State Buiding à New York et qui compte aujourd'hui parmi ses habitants remarquables nos G.O. de l'année, nous atteignons la première étape de la journée : le lac de Sylans et ses glacières dont ne subsistent que des vestiges et le souvenir.  

Ce lac se situe à peu près à égale distance de Bellegarde sur Valserine (la bien nommée) et de Nantua dans la cluse du même nom.  

Bénéficiant d'une exposition favorable, pratiquement toujours dans l'ombre, en particulier l'hiver il gelait quasi totalement. Dans ces époques lointaines où l'on n'évoquait même pas le réchauffement climatique, un cafetier de Nantua, le ci-nommé Joachim Moinat, eut en 1864 l'idée ingénieuse d'exploiter la situation en récupérant la glace de ce lac de décantation, long de 2 kms, large de 200 à 300 mètres et d'une profondeur maximum de 22 m. Entres autres particularités ce lac se vide par le fond et l'une de ses résurgences est mise en bouteille par la société Cristalline (source Neyrolles). L'eau y est très pure et la glace itou.  


Les galeries de photo défilent
automatiquement ou au clic de souris

- Entrée des Glacières
Au passage de la souris:
- Les ruines des glacières et l'autoroute des Titans

O
Imaginez alors, dans le silence environnant, par ces jours gris d'hiver, sous le blanc manteau neigeux, des paysans descendus du Poizat ou de Neyrolles à l'appel d'une cloche, munis de pics, de pelles et sommairement vêtus découpant la glace en blocs et halant ceux-ci vers des baraques en bois pour un premier stockage avant expédition, sur des charrettes, vers Nantua pour rafraîchir la limonade.  

L'affaire prospère et assez vite les baraques en bois à double paroi avec de la sciure comme isolant vont laisser la place à des bâtiments en pierre.

Mais les transports sont si lents que lors des expéditions vers Paris, Bordeaux, Marseille, et même Alger, près de 50% du chargement se liquéfie en route. En 1883, le chemin de fer longe le lac et une gare est créée.
Tout est réuni pour toucher le Jackpot. En 1885, notre cafetier vend l'affaire aux Glacières de Paris qui en 1910 construisent les bâtiments en pierre.
Un système élévateur actionné par une machine à vapeur puis un astucieux réseau de toboggans en bois améliorent la manipulation des blocs.

Fini le silence seulement troublé par le bruit des pics.  
S'ensuivent de mauvaises années de production, la guerre de 1914-18 et l'invention du réfrigérateur. Qui a dit que Kelvinator ?  
En 1917 c'est la dernière expédition. En 1925 le site est démantelé, les bâtiments vidés. Le lieu devient une aire de pique-nique dominical appréciée, il y a une gare!  
En 1928 une tornade découvre une grande partie des maisons du Poizat et de Neyrolles. Les villageois vont récupérer tuiles et pièces de charpente pour réparer leurs habitations endommagées.  
Pendant la 2ème guerre mondiale en 1942 sont coulés des piliers en béton pour consolider les édifices.  
Puis un Italien rachète l'ensemble pour en faire une boîte de nuit qui périclite rapidement. Enfin le site est repris par la communauté de communes qui en assure la sauvegarde. 

- Principe de construction d'une glacière
Au passage de la souris
- Les ruines des glacières

On visite aujourd'hui les vestiges de la grande glacière, de la petite, de l'élévateur, de la gare et des annexes (poudrière, maison du contremaître, etc...)  
On peut apercevoir comment était conçue l'isolation des bâtiments avec la dalle de béton couverte de 60cm de paille de chanvre (bravo Mr Hennebique!), la division en cellules, les ouvertures côté nord, le quai de chargement d'où partaient jusqu'à 30 wagons par jour.  

De nos jours le TGV emprunte la ligne de chemin de fer mais, au sortir d'un tunnel et avec la végétation qui prolifère, bien peu de voyageurs doivent remarquer cet ancien site industriel.  

Sic transit gloria mundi!! Toute similitude avec des situations que vous connaissez ou avez connues ne serait donc pas pure coïncidence. ndr  
Le site est retourné au silence, enfin tout est relatif car la cluse est parcourue par l'autoroute des Titans (3 tunnels dont le plus long fait 3,3 kms et 9 viaducs dont un de 1860 m à Nantua, le tout sur une vingtaine de kms) et ses caravanes de poids lourds.


Nous quittons les lieux à 11h50 en direction de Chatillon en Michaille pour la 2ème étape, l'auberge du Catray. De là panorama somptueux sur toutes les Alpes du Nord, des Alpes bernoises jusqu'aux Aravis et aux Bauges, en passant par le Mont Blanc. On aperçoit le lac du Bourget (Ô, temps, suspend ton vol...)  
 

Installation en terrasse pour un apéritif face au paysage. Soleil radieux!
 
Après un kir pour se mettre les papilles en éveil, nous dégustons:  
Aumonière au bleu de Gex  
Quenelles de brochet sauce Nantua  
Fromages du Jura  
Bavarois aux framboises
 
Le café de clôture suffira-t-il à nous tenir en éveil pendant le trajet vers Oyonnax et sa Plastic Valley?  
Que nenni!

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C'est ainsi qu'après 1 h 05 de bus consacrée pour la plupart des participants à une sieste réparatrice nous atteignons le centre culturel Louis Aragon qui abrite le musée du peigne et de la plasturgie, 3ème étape du jour.  
 

Tout aurait commencé en l'an 639. Leodogarius émissaire de Clovis II roi des Francs de Bourgogne et de Neustrie, fils de Dagobert 1er, en route pour Genève où il allait demander la main de Bathilde, une princesse saxonne esclave du roi des Burgondes, eut un accident de litière en traversant le Haut-Jura.

Il fut promptement dépanné par les Oyonnaxiens qui, comble du fayot, le couvrirent de cadeaux de leur fabrication. La mission réussit et Leodogarius devenu évêque puis ministre de Childéric II (si, si!!) leur concéda le monopole de la fabrication des peignes de buis dont usaient les guerriers francs qui avaient les cheveux longs mais pas les idées courtes.

Ce privilège fit la fortune d'Oyonnax et Leodogarius fut béatifié et devint saint Léger, patron des fabricants de peignes.
  
Comme quoi une panne de litière peut avoir du bon! Car le peigne vient de loin et un premier spécimen, en os et daté de 8500 avant JC est exposé.  

Hélas, vers la fin du 18ème siècle, le buis en prend un coup et vient à manquer. Qu'à cela ne tienne, nos Oyonnaxiens ont de la ressource et surtout des vaches, qui, accessoirement au lait qui donne le fameux Comté et aussi le Bleu de Gex, ont des cornes. Il suffit de les ramollir (les cornes, pas les vaches!!!) par trempage, de les aplatir puis de les passer au four et le tour est joué.

De là les peignes en corne à peu près inusables et dont quelques spécimens modernes sont encore en vente à la boutique du musée (l'histoire ne dit pas s'il y a des vaches à cornes en Chine).  
On nous présente les machines ingénieuses qui permettaient d'accomplir ce miracle.



- L'ancêtre des peignes 
2e photo au passage de la souris
- Machine à ramollir les cornes
Or dans le même temps, comme chacun sait, pendant la guerre de Sécession les combattants en vinrent à se lancer des boules de billard et ça peut faire très mal. Comme il en fallait beaucoup, la société Cellar et Collander inventa le celluloïd en 1863.
Mais la guerre de Sécession cessa, ça c'est sûr. Aussi 10 ans plus tard présentèrent-ils leur invention à l'exposition universelle. Nos facétieux Oyonnaxiens s'en emparèrent pour faire... des peignes. Et comme il fallait passer à la phase industrielle, il fallut se spécialiser, qui en polissage, qui en sertissage, etc…  
Puis le système s'emballe et on commence à fabriquer des objets en plastique, des meubles, des vêtements (Paco Rabanne), des chaussures, des jouets et pour finir des montures de lunettes concurrençant sans vergogne la voisine, Morey dans le Jura.
 
Aujourd'hui pour réduire le 6ème continent qui flotte dans nos océans, les plasturgistes recherchent des plastiques biodégradables pour développer une filière « verte ».  

En conclusion Oyonnax reste la capitale de la plasturgie et ses 23000 habitants ont un avenir radieux.

 
A 17h30 Nous réembarquons dans notre bus qui sur le trajet du retour fait un arrêt au belvédère de Cerdon d'où l'œil embrasse les vignes où est produit justement le Cerdon, un vin du Bugey naturellement pétillant, et la plaine de l'Ain.  
Manque de chance les deux établissements où nous pensions pouvoir nous désaltérer sont fermés. C'est donc la gorge sèche que nous arrivons à l'hôtel vers 19h10.  

Et comme chaque jour notre périple se termine par un riche banquet à partir de 20h suivi d'une bonne nuit avant d'attaquer la matinée optionnelle mais ceci est une autre histoire.  
                                                                                      Texte rédigé par Yves Portejoie.  
                                                                                      Photos fournies par l’auteur.