ASSOCIATION des DIRECTEURS RETRAITES des LABORATOIRES VETERINAIRES DEPARTEMENTAUX

L’AIN DES PLAISIRS A VIVRE Du 28 mai au 1er juin 2019

Mercredi 29 mai - Bresse et Dombes -
par Christian Bordas 
Programme
Bresse et Dombes
Monastère de Brou
Sylans, Oyonnax
Bourg en Bresse
VétoVermeil
Photo

 La journée s'annonce clémente, sous un ciel nuageux et une température modérée. Dès 9 heures, Christian, notre chauffeur, nous conduit à une quinzaine de kms à l'ouest de Bourg (à prononcer en réalité Bourk) à la ferme musée des Planons.

Nous voilà donc en rase campagne, dans un site verdoyant, bien bocager, déjà choisi par un rossignol dont nous entendons le remarquable chant par intermittence.

La ferme, du XIVème siècle, classée monument historique en 1938, a été achetée avec ses 48 hectares par le département de l'Ain en 1988 et restaurée après 1992 date de sa cessation d'activité.

Thomas notre guide nous entraîne, par un porche, dans une vaste cour quadrangulaire entouré de 5 bâtiments dont l'habitation imposante nous fait face.
Sur le pourtour, décorés d'épis de maïs suspendus, se succèdent remises, granges de stockage et écuries. A gauche se trouve le puits flanqué d'un frêne déjà bien développé.

Notre guide nous plante alors un décor global. « Bresse »vient de l'époque romaine de « Sallus Brixiae », Sallus désignant une région boisée.
Elle fut annexée au comté de Savoie dès le XIIIème siècle et rattachée au royaume de France par le traité de Lyon en 1601.  
Cette région, d'environ 4000 km2, est limitée à l'ouest par la Saône, au nord par le Doubs, à l'est par les contres forts du Jura et au sud par la Dombes.

C'est une plaine vallonnée, de marne, sable et argile propice aux céréales dont le maïs depuis le XVIIème et à l'élevage des bovins et des volailles. L'importance de son élevage équin ne m'a pas été confirmée par Daniel Baroux, notre invité du dîner. Cette vocation agricole très ancienne justifie la présence de ce domaine du moyen âge, nécessitant la participation d'une vingtaine de personnes.


La façade de l'habitation, orientée à l'est, présente deux niveaux, avec devant les ouvertures, une galerie soutenue par une élégante série d'arcades aux poteaux de chêne bien chanfreinés.

Les galeries de photo défilent
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L’arrière du logis donnant sur le jardin possède une galerie de séchage avec un ancien cueille essaim conique à poignée en paille tressée.

Le toit, peu pentu, recouvert de tuiles creuses, laisse dépasser la cheminée en forme de petit clocher ou mitre. Les pignons, sans ouvertures, présentent en haut une frise en croisillons de bois.

En l'absence de pierre locale, le bois et l'argile crue ou après séchage et cuisson, ont permis ces constructions avec colombages ou pans de bois. Ainsi, sur un soubassement solide en briques, sont posés de gros poteaux verticaux réunis par des traverses horizontales constituant le pan qui va être consolidé par des arbalètes obliques et des croix de Saint André.
Un lattage de coudrier destiné à recevoir le torchis, sera cloué sur cette armature.
Cet élément de remplissage résulte d'un malaxage d'argile et de paille qu'on pourra chauler et lisser pour éviter l'humidité. Ce matériau peu coûteux, intéressant sur le plan acoustique et thermique, possède une rare souplesse lui permettant d'accompagner le travail naturel du bois. Le pisé nécessite moins de bois et de travail de charpente.
L'argile, sans fibre, sera tassée dans une banche ou coffrage de planches bien rigidifiée de la largeur du mur. Après séchage partiel le coffrage sera déplacé latéralement puis verticalement. Peut-être ces détails techniques vont-ils susciter des vocations !
La grande cuisine, où nous pénétrons, s'ouvre sur plusieurs chambres dont celle du personnel, celle plus confortable du seigneur et une sorte d'arrière-cuisine fourretout où l'on lave, cuit, bricole, transforme le lait et prépare la pâtée des porcs dans une immense marmite. De la pièce principale, très chargée, nous retiendrons surtout ce qui nous semble le plus caractéristique. Donc priorité d'abord à la cheminée dite sarrasine. Ce foyer central ouvert, très primitif est constitué d'une hotte volumineuse plutôt basse, pyramidale à section carrée à sa base, octogonale en partie haute, elle se termine en saillie sur le toit par une mitre en brique à plusieurs niveaux d'ouverture, prolongée par une croix latine.

Citons également le tin-te-bin avec son panneau à glissière sorte de youpala pour apprendre la marche aux enfants.
Admirons également ce grand coffre à gaufres aux colonnes de bois ajourées destiné à la conservation des produits de sarrasin sur une toile de chanvre.
Table, divers coffres, vaisselier, armoires forment un ensemble classique.

L'alimentation est variée; elle associe les légumes, les fruits, aux produits laitiers et aux salaisons diverses, sans oublier les volailles avec les œufs conservés dans la cendre.
Régime très riche en pain et gaufres et surtout beurre et lard, régime sans doute hyper calorique, mais de nature à permettre une intense activité physique permanente. 
 
Dans les volailles, mention très spéciale pour la poule. Elle peut être, selon l'origine noire, grise ou blanche.
C'est cette dernière, la Bresse gauloise, qui figure au standard de la société d'aviculture de France.
Elle constitue dans 250 élevages, le million de volailles vendues en poulets, poulardes et autres chapons sous la protection d'un label de 1957 garantissant un élevage en plein air et donc une alimentation naturelle complétée par des céréales et du petit lait.
Jacques Pons nous signale alors dans un local proche une présentation impressionnante de ces volailles avec les prix afférents ardemment convoités par les éleveurs au cours des 4 glorieuses de Bresse.

Pour autant, le Bresse bleu, fromage persillé de vache, fabriqué depuis 1952, ne doit pas être oublié. 

Le temps presse. Après un passage éclair dans la remise et son lot classique de fourches, faux, araires, tarares, jougs, enclumes  … nous traversons le parc de 22 hectares bien arboré, avec mare et enclos pour volailles ainsi que l'espace muséographique moderne de 3000 m2, en arc de cercle, en verre et métal, abritant les témoins du passé dont les splendides émaux. 
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Vonnas, légèrement au sud, ne saurait attendre. Imaginez un village bien fleuri (label ville fleurie 4 étoiles avec en plus un prix de la diversité florale). Vous y ajoutez un petit pont enjambant un canal, une grande esplanade de platanes avec au fond un ensemble de commerces soulignés en rouge du début XXème siècle. C'est le village Blanc géré par Georges, meilleur cuisinier de France en 1981, le plus ancien toqué Michelin avec 3 étoiles. Son restaurant continue à recevoir les plus grands à des prix faramineux. Rassurez-vous, c'est à coté, à l'ancienne auberge que nous déjeunons.

Aucun regret cependant, vu le décor, dont les affiches, le personnel bien stylé et en tenue, une qualité de cuisine à faire chavirer les papilles !


Auberge de Vonas
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Le menu :
- Tranches de saumon saumuré (au moins 80 g )
- Quasi de veau ''en cuisson douce'' au vin jaune et mariage d'épices avec polenta forestière (agrémentée de trompettes des morts )
- Fromage sec ou blanc (avec ou sans crème )
- Gâteau grand-mère Blanc à l'orange et sorbet quatre fleur
s.
Le tout arrosé d'un verre de Mâcon village et de Beaujolais.

Même Malow, le sympathique compagnon de Roselyne et Jean-Pierre, eut droit à son écuelle.

Nous enchaînons, à proximité, par la traditionnelle photo de groupe orchestré, sans trépied, mais avec bonheur par un Jean-Jacques plus affûté que jamais. Jacques notre talentueux opérateur habituel y participera aussi en la sous titrant à distance en un temps record. 

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Nous nous dirigeons vers Châtillon sur Chalaronne, à une quinzaine de km au sud-ouest de Bourg pour y retrouver Stéphanie et Michel nos guides pour la Dombes.

C'est un plateau d'environ 200 m d'altitude et 1000 km2 d'origine morainique (avec dépôts de sable cailloux et argile). Située au nord-est de Lyon, elle a pour limites à l'ouest la Saône, au sud la côtière surplombant la plaine du Rhône, à l'est l'Ain, le nord jouxtant la Bresse. 

Les glaciers ont laissé de nombreuses et importantes poches argileuses utilisées par les moines dès le XIème siècle pour la réalisation d'étangs, souvent disposés les uns sous les autres.
Leur faible profondeur et leur seule alimentation par les précipitations les caractérisent. Les vidanges régulières assuraient alors les protéines des jours de jeun.
Par la suite, accusés par leur humidité d'engendrer de nombreuses maladies dont le paludisme certains furent asséchés. Ils ne durent leur survie qu'à la mort prématurée de Danton qui voulait les supprimer.
Première région piscicole de France avec environ 1200 étangs d'une moyenne de 10 hectares, les quelques 600 producteurs commercialisent par an dans les 1200 tonnes, mais seulement 700 en 2017 suite à la sécheresse.

Cette production soumise à des règles strictes est labellisée sous le vocable poisson de Dombes. Des carpes miroir de 1 à 3,5 kg produites en quantité, les filets représentant 30% en poids sont levés et leurs arrêtes broyées. Ce choix tient compte de la productivité et de la résistance hors de l'eau de cette espèce dont l'odeur avérée de vase pourra être supprimée par un dégorgeage de 48 à 72 heures dans une eau claire. Les poissons blancs (rotengles et gardons), les brochets et sandres (4 à 5%) et les tanches (15% ) complètent la liste.
Traditionnellement les étangs sont pêchés 3 années consécutives, la 4e après vidange complète permettra l'assec avec mise en culture de céréales. Le sol bien enrichi et chaulé favorisera la croissance des poissons à la prochaine remise en eau et assurera la disparition du poisson chat grand perturbateur du biotope.
La vidange normale a lieu d'octobre à novembre, lentement pour permettre aux poissons de quitter les poches d'eau et de se rassembler dans la partie profonde réservée à la pêche.
Cette opération a lieu en partant de l’étang en amont en réglant soigneusement le débit de la bonde de fond et en concertation avec les riverains en aval qui doivent régler leur déversoir pour éviter les inondations.

Dès le seuil de pêche atteint, une équipe d'hommes solides, ahanant comme les bœufs de jadis, va alors tirer le filet vers le bord en entraînant le poisson vers une autre équipe chargée de la récupération.
Très rapidement il va être jeté sur la table de tri, répertorié par espèces, pesé et réparti dans des cuves placées sur remorque. Ce travail, même avec peu de vase, rendu pénible par temps froid et humide demande, vu la fragilité du produit, rapidité et organisation.
De ces poissons, une partie prioritaire va servir au ré-empoissonnement, les grosses carpes intéresseront les pêcheurs à la ligne. La majeure partie sera consommée sous forme de filets, de goujonnettes (languettes de poisson frit) et autres quenelles.
Le revenu est cependant faible de l'ordre 300 € annuel net par hectare.
En 2017 la chaleur et le manque d'eau ont entraîné une élévation de la température de l'eau couplée à une désoxygénation dramatique. L'alerte orange persiste encore.
De plus, la pression des prédateurs est préoccupante : Outre le poisson chat, citons le ragondin vecteur de la leptospirose, grand destructeur de roseaux et fouisseur de digue impénitent. Pire, le cormoran agissant en commando de dizaines d'individus capables en quelques jours de vider un étang à raison de 500 g par jour de poisson pour un individu !
Il faut bâcher pour abriter les poissons et poser des filets dissuasifs. En comparaison le héron solitaire avec ses 100 g par jour fait figure d'enfant de cœur.
Mais heureusement il reste la grande majorité des autres oiseaux, qui attirent d’ailleurs les chasseurs lyonnais tout proches.
En effet ces étangs peu profonds permettent une grande prolifération de végétaux bien utiles pour leur nourriture et leur nidification. C'est pourquoi la Dombes a été placé en ZICO (zone importante pour la conservation des oiseaux).

Pour illustrer cette belle réalité, un arrêt est prévu au château de Bouligneux, à 10 km au sud de Châtillon. C'est une forteresse du 14e construite en brique, restaurée et toujours habitée par la même famille. Elle est baignée latéralement par un étang de 14 hectares.

C'est là que Michel a placé sa longue vue sur trépied réglée sur un groupe d'oiseaux en pleine eau. Des jumelles complémentaires sont également mises à disposition. Chacun peut alors identifier canards col vert, nettes rousses, foulques et autres grèbes. Énumérer les autres espèces sédentaires (plus de 130) ou migratrices tels fuligules, sarcelles, mouettes, aigrettes, bécassines, vanneaux, râles, poules d'eau, ne saurait épuiser le sujet.
Sur le retour, à droite, nous remarquons quelques nids de cigogne habités par des jeunes.

La tête bourdonnante de toute cette faune ailée nous arrivons à Châtillon où est présenté un film sur la pêche et la confection d'un porte clef avec le cuir de carpe. Il est réalisé à partir de la peau tannée de filet de carpe miroir et commune. Il paraît à la fois solide, souple et surtout sans odeur. La séance se termine par une dégustation de rillettes de carpes bien sûr, diversement assaisonnées.
 

Confection d'un porte clé avec du cuir de carpe
Nous regagnons l'hôtel. La journée a été variée, captivante et surtout bien remplie.  
 
UN GRAND MERCI à Annie et Bernard. 
 
                                                                                            Le Rédacteur Christian Bordas
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